Organisation gouvernementale pour la gestion des crises majeures
Circulaire de la Première Ministre aux membres du Gouvernement et aux préfets du 26/09 2023
Les appendices de la circulaire (Appendice 1 : procédure de diffusion de l'alerte pour activation ou désactivation de la CIC Appendice 2 : les centres opérationnels des ministères Appendice 3: schéma d'organisation gouvernementale de conduite de crise Appendice 4: les cellules thématiques d'appui à la CIC Appendice 5 : les mécanismes d'échange d'information, de coopération et de coordination mis en place au sein de l'Union européenne Appendice 6 : glossaire 5) sont consultables dans le document PDF joint
« Depuis sa création en 2010, la cellule interministérielle de crise (CIC) a illustré la volonté de l'État d'assurer le bon fonctionnement de la coordination interministérielle lors des crises majeures de tous types. La CIC est l'outil sur lequel le Premier ministre s'appuie pour exercer, en liaison avec le Président de la République, le pilotage politique et stratégique de l'action gouvernementale en matière de gestion des crises majeures… Tirant les enseignements des crises survenues ces dernières années, la CIC s'est révélée être un échelon de coordination et d'appui essentiel aux ministères, préfets et services déconcentrés. Cette structure a parfois même été activée par anticipation, pour le suivi d'activités spécifiques ou dans la perspective de l'organisation de grands évènements, afin de s'assurer de la plus grande réactivité de l'État.»
I ) Rappel des responsabilités gouvernementales pour la préparation et la gestion de la réponse aux crises majeures
Conformément aux orientations des Livres blancs sur la défense et là sécurité nationale, les responsabilités gouvernementales pour la préparation et la gestion de la réponse aux crises majeures s'appuient sur les principes suivants :
- pour la gestion des crises majeures, les responsabilités dévolues au Premier ministre, en liaison avec le Président de la République, impliquent la mise en place d'une organisation spécifique ;
- chaque ministre est responsable de la préparation et de l'exécution des mesures de défense et de sécurité nationale relevant de son ministère.
Les objectifs sont d'assurer la protection de la population et du territoire, de maintenir le fonctionnement des pouvoirs publics et d'assurer la continuité de la vie de la Nation.
1.1- Les responsabilités du Président de la République et du Premier ministre
La direction politique et stratégique des crises majeures est assurée par le Premier ministre en liaison avec le Président de la République.
Les responsabilités du Président de la République et du Premier ministre sont déterminées par la Constitution du 4 octobre 1958. Elles ont été précisées dans le code de la défense dans sa partie consacrée aux principes généraux de la défense :
- le Président de la République« assure par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l'État » (article 5 de la Constitution). Il dispose du conseil de défense et de sécurité nationale qui arrête les décisions en matière de direction politique et stratégique de réponse aux crises majeures (article L. 1111-3 du code de la défense) ;
- le Premier ministre« dirige l'action du Gouvernement» (article 20 de la Constitution). A ce titre, il« prépare et coordonne l'action des pouvoirs publics en cas de crise majeure» (article L. 1131-1 du code de la défense).
Ensemble, ils fixent, dans les instances adaptées aux circonstances, les objectifs de sortie de crise à atteindre et les stratégies de relations internationales et de communication.
1.2- Les ministres qui ont une responsabilité particulière dans la préparation et la conduite de la gestion de crise
Le ministre de l'intérieur est responsable de l'anticipation et du suivi des crises susceptibles d'affecter la sécurité intérieure et la sécurité civile. Il est chargé de la conduite opérationnelle des crises sur le territoire de la République (article L. 1142-2 du code de la défense). Il doit également, au titre de la préparation à la gestion des crises, s'assurer de la transposition et de l'application au niveau déconcentré des plans gouvernementaux.
Le ministre de la défense (1) est responsable de l'anticipation et du suivi des crises intéressant la défense. Il est responsable de la préparation et de la mise en œuvre de la politique de défense (article L. 1142-1 du code de la défense). Le chef d'état-major des armées est responsable de l'emploi des forces, sous l'autorité du Président de la République et du Gouvernement (article R.* 3121-1 du code de la défense). Le commandant de la défense aérienne et des opérations aériennes est chargé, en toutes circonstances, de l'application des mesures de sûreté aérienne dans les conditions fixées par le Gouvernement (2) Enfin, les armées contribuent au volet « action de l'État en mer » de la posture permanente de sauvegarde maritime par l'intermédiaire de commandants de zone maritime. Le ministre de l'Europe et des affaires étrangères coordonne la gestion des crises extérieures ainsi que la planification civile de celles-ci avec le concours de l'ensemble des ministères et des services de l'État concernés (article L. 1142-6 du code de la défense). Il traduit, dans l'action diplomatique au niveau européen et au niveau international, les priorités de la stratégie de sécurité nationale et de la politique de défense.
1.3- La contribution des autres ministres à la préparation et à la conduite de la gestion de crise
« Chaque ministre est responsable, sous l'autorité du Premier ministre, de la préparation et de l'exécution des mesures de défense et de sécurité nationale incombant au département dont il a la charge» (article L. 1141-1 du code de la défense). Cette responsabilité est globale et nécessite que les ministres s'organisent, dans leur champ de compétence ministérielle, pour apporter leur contribution à l'action du Gouvernement, aussi bien dans la conduite de la gestion de crise que dans la mise en œuvre des politiques de prévention. A cette fin, ils mobilisent autant que nécessaire les opérateurs de leurs secteurs d'activité pour l'analyse et la résolution des crises.
Pour l'exercice de leurs responsabilités en matière de défense et de sécurité, les ministres sont assistés de hauts fonctionnaires de défense et de sécurité (3) (articles R. 1143-1 et suivants du code de la défense). Ces derniers relèvent directement du ministre qu'ils conseillent pour toutes les questions relatives à la défense et aux situations d'urgence affectant la défense, la sécurité et la vie de la Nation. Ils sont chargés en particulier de l'organisation et du maintien en condition opérationnelle du dispositif ministériel de situation d'urgence (article R. 1143-5 du code de la défense). Ils veillent à la préparation et à la mise en place des moyens destinés à permettre au ministre dont ils relèvent d'assurer la conduite opérationnelle de l'action gouvernementale en situation de crise (article R. 1143-7 du code de la défense).
Le ministre de la justice assure en toutes circonstances la continuité de l'activité pénale ainsi que l'exécution des peines. Il concourt, par la mise en œuvre de l'action publique et l'entraide judiciaire internationale, à la lutte contre les atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation (article L. 1142- 7 du code de la défense).
Le ministre chargé de l'économie et des finances est responsable de la préparation et de l'exécution de la politique de sécurité économique. Il prend les mesures de sa compétence garantissant la continuité de l'activité économique en cas de crise majeure et assure la protection des intérêts économiques de la Nation. Il oriente l'action des ministres responsables de la production, de l'approvisionnement et de l'utilisation des ressources nécessaires à la défense. et à la sécurité nationale. Conjointement avec le ministre chargé du budget, il assure la surveillance des flux financiers (article L.1142-3 du code de la défense).
Le ministre chargé de la santé est responsable « de l'organisation et de la préparation du système de santé et des moyens sanitaires nécessaires à la connaissance des menaces sanitaires graves, à leur prévention, à la protection de la population contre ces dernières, ainsi qu'à la prise en charge des victimes. Il contribue à la planification interministérielle en matière de défense et de sécurité nationale en ce qui concerne son volet sanitaire» (article L.1142-8 du code de la défense).
Les ministres chargés de l'environnement, des transports, de l'énergie et de l'industrie sont responsables, chacun en ce qui le concerne, en matière de maîtrise des risques naturels et technologiques, de transports, de production et d'approvisionnements énergétiques ainsi que d'infrastructures, de la satisfaction des besoins de la défense et de la sécurité nationale et, en toutes circonstances, de la continuité des services (article L 1142-9 du code de la défense).
II) Activation de la cellule interministérielle de crise et désignation du ministre chargé de la conduite opérationnelle de la crise
2.1- Les principes de mise en place de la cellule interministérielle de crise et de désignation du ministre responsable de la conduite opérationnelle de la crise.
Pour exercer sa responsabilité dans la direction de crise, le Premier ministre s'appuie sur un dispositif gouvernemental dénommé ce/fuie interministérielle de crise (CIC).
Pour assurer, en son nom, le premier niveau de la coordination gouvernementale dans une situation de crise majeure, le Premier ministre peut confier la conduite opérationnelle de la crise à un ministre qu'il désigne en fonction de la nature des événements, du type de crise ou de l'orientation politique qu'il entend donner à son action.
La désignation d'un ministre chargé de la conduite opérationnelle de la crise entraîne l'activation de la CIC qui regroupe l'ensemble des ministères concernés. Ce ministre prend alors la fonction de président de la CIC.
Conformément aux Livres blancs sur la défense et la sécurité nationale, le Premier ministre confie en principe la conduite opérationnelle de la crise :
- au ministre de l'intérieur lorsque la crise a lieu sur le territoire national ;
- au ministre de l'Europe et des affaires étrangères pour les crises extérieures.
Le cas échéant, il peut confier la conduite opérationnelle au ministère des armées quand la crise se déroule en mer, en dehors des limites administratives d'un port français.
Il peut également décider de conserver à son niveau ou de prendre à son compte tout ou partie de la conduite opérationnelle de la crise, en liaison avec le Président de la République.
2.2- De la crise sectorielle à la crise majeure
La décision de constituer la CIC peut être prise dès la survenance d'une crise ou lors de son développement. La CIC peut également être activée en prévision d'un événement majeur en fonction des informations recueillies sur l'ampleur ou les désordres attendus.
Selon son intensité, une crise peut en effet être qualifiée de majeure dès son apparition ou pendant son développement. L'État doit être en mesure d'anticiper cette évolution et de se préparer à la montée en puissance progressive de son dispositif de réponse.
2.2.1 La montée en puissance du dispositif gouvernemental de gestion des crises majeures
Avant de devenir majeure, une crise peut ne concerner qu'un seul secteur d'activités. Dans ce cas, le ministre chargé du secteur affecté est responsable de la réponse à la crise. Il active la cellule de crise de son département ministériel et la cellule communication de son ministère, qui s'appuient sur son centre opérationnel ministériel.
Ce ministère mobilise les directions placées sous sa responsabilité. Il est en relation étroite avec les opérateurs et les experts de son périmètre de compétence qui lui apportent toutes les informations nécessaires au traitement de la crise.
Lorsque la crise a des implications maritimes, le secrétariat général de la mer apporte son concours av ministère responsable. Lorsqu'elle a des implications aériennes, le commandant de la défense aérienne et des opérations aériennes apporte son expertise.
La dimension interministérielle doit être anticipée dès les premiers développements d'une crise.
A cet effet, le ministre chargé du secteur affecté par la crise diffuse des points de situation réguliers et amorce la coordination avec les hauts fonctionnaires de défense et de sécurité et les centres opérationnels des autres ministères concernés.
Dans ce but, le ministre :
- facilite la présence au sein du centre opérationnel de son ministère d'éléments avancés des principaux ministères susceptibles d'être concernés par la montée en intensité de la crise ;
- veille à l'information des autorités gouvernementales, des autres ministères, des centres opérationnels et des échelons territoriaux, notamment par la diffusion de compte-rendu des réunions de la cellule de crise de son ministère ;
- s'appuie sur le réseau des hauts fonctionnaires de défense et de sécurité et des centres opérationnels par audioconférences ou par tout autre moyen ;
- organise éventuellement toute réunion interservices utile. Les différents ministres peuvent ainsi s'organiser pour permettre au Premier ministre d'anticiper l'évolution de la crise, en décelant tous les éléments susceptibles de la transformer en crise majeure par l'augmentation de son intensité et de ses impacts concernant plusieurs secteurs.
2.2.2 La décision d'activer une CIC pour faire face à une crise majeure
La crise devient majeure lorsqu'elle affecte plusieurs secteurs ministériels et impose en conséquence une réponse globale de l'État. L'intensité d'une crise est évaluée à l'aune des critères suivants :
- ses conséquences sur l'intégrité physique et la sécurité de la population ;
- sa dimension politique et médiatique;
- l'atteinte qu'elle porte aux intérêts vitaux de la Nation ;
- ses conséquences sociales, économiques et environnementales ;
- son ampleur territoriale, voire internationale.
La CIC doit être activée suffisamment en amont, dès lors que l'extension de la crise à plusieurs secteurs est envisagée, afin de pouvoir monter en puissance et exercer au mieux la capacité d'anticipation. Dans tous les cas, la décision du Premier ministre de constituer une CIC et de désigner le ministre qui en assure la direction, est formalisée par un message transmis par le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) (4).
2.2.3 Activation de la CIC par anticipation
Pour le suivi d'activités spécifiques ou dans la perspective de l'organisation de grands évènements en métropole ou outre-mer, le Premier ministre peut activer la CIC par anticipation d'une crise majeure potentielle afin de s'assurer de la plus grande réactivité de l'État.
Il appartient au Premier ministre ou au ministre désigné en qualité de président de la CIC d'arrêter la liste des ministères conviés en CIC et les fonctions à activer.
2.2.4 Création d'entités temporaires ou pérennes pour le suivi de grands évènements ou de thématiques pré-identifiées
La création d'entités, temporaires ou pérennes, s'intégrant à l'organisation gouvernementale de gestion de crise peut être opportune afin d'assurer le suivi d'un enjeu particulier nécessitant une coordination interministérielle dans la durée et pour préparer au mieux de grands évènements organisés par la France (évènements sportifs internationaux, évènement diplomatique, etc.). Il s'agit de garantir une réponse appropriée des services de l'État et, le cas échéant, disposer des premières ressources pour faire face aux conséquences d'une crise majeure.
La création d'une telle structure doit s'accompagner d'un référentiel opérationnel qui en précisera les modalités de fonctionnement et d'articulation, en conformité avec les règles fixées dans la présente circulaire et le référentiel opérationnel de la CIC.
Dans le cadre de la préparation des grands évènements sportifs organisés par la France en 2023 et 2024, le choix a été fait d'instituer un centre national de commandement stratégique (CNCS). (5)
Cette structure de veille et de pilotage interministériel, rattachée au ministère de l'Intérieur et des Outre[1]mer, armera la CIC en cas de crise pendant la Coupe du monde de rugby 2023 et les jeux Olympiques et Paralympiques 2024.
III) Organisation et fonctionnement de la cellule interministérielle de crise
L'organisation gouvernementale pour faire face à une crise majeure repose sur la capacité de l'État à mettre en commun ses ressources en matière de recherche et d'analyse de l'information, d'anticipation, de décision et de communication, afin de permettre au Premier ministre, en liaison avec le Président de la République, d'exercer pleinement sa responsabilité de direction de crise.
Le présent chapitre fixe les principes de cette organisation et décrit le cadre dans lequel les ministères doivent se placer pour assurer le fonctionnement de la CIC.
Un référentiel opérationnel de la CIC précise les modalités applicables concernant l'activation, l'organisation, le fonctionnement et la désactivation de la CIC.
3.1- La répartition des rôles dévolus aux différentes autorités gouvernementales au sein de la CIC
Le Premier ministre, en liaison avec le Président de la République, fixe la stratégie générale de réponse de l'État en définissant :
- l'objectif à atteindre en sortie de crise ;
- les impératifs politiques, les priorités et les contraintes majeures ;
- la stratégie des relations internationales ;
- la stratégie de communication gouvernementale.
Le président de la CIC, er s'appuyant sur l'ensemble des ministères représentés en CIC, assure pour le compte du Premier ministre :
- la centralisation de toutes les informations en relation avec la crise ;
- l'analyse de ces informations ;
- la conception des scénarios d'anticipation; la préparation des décisions ;
- la coordination interministérielle dans la mise en œuvre des décisions gouvernementales.
A ce titre, il organise les travaux de la CIC pour apporter au Premier ministre :
- des points de situation (événements, bilan humain et matériel, moyens engagés, couverture médiatique, état de l'opinion, etc.) ;
- des évaluations (menace immédiate, évolution des risques, bilan à terme, sur le territoire national et concernant les ressortissants français à l'étranger, engagement des moyens, etc.).
Il lui propose des décisions (activation des plans gouvernementaux, mise en œuvre de capacités spécifiques, prise d'actes juridiques particuliers, etc.) et fournit des éléments d'anticipation et des propositions de choix stratégiques.
Tous les ministres concernés par la crise participent à la CIC afin d'y apporter les compétences de leur département ministériel, de contribuer au recueil et à l'analyse de l'information, ainsi qu'à l'élaboration des propositions de décision qui seront soumises au Premier ministre. Leur participation à la CIC garantit une réponse coordonnée de l'État dans chacun des champs de compétences ministériels concernés. Le chef d'état-major des armées (CEMA) assiste à la CIC ou se fait représenter, au sein de la représentation du ministère des armées, ainsi que le commandement de la défense aérienne et des opérations aériennes (CDAOA) lorsque la crise est de nature aérienne.
Le ministre chargé du secteur principalement affecté par la crise a un rôle essentiel au sein de la CIC. ll la fait bénéficier de sa connaissance du secteur, de ses liaisons avec les principaux acteurs relevant de son domaine de compétence et de son expertise.
Les décisions concernant les relations avec les États étrangers et les organisations internationales sont prises dans le respect des attributions du ministre de l'Europe et des affaires étrangères et dans le respect des règles d'entraide judiciaire internationale.
3.2- La direction de crise et les fonctions de la CIC
La CIC permet au Premier ministre de définir des axes de conduite de crise par la mise en commun des ressources des différents ministères. Elle s'appuie sur les différents centres opérationnels ministériels et interministériels qu'elle met en réseau et qui l'alimentent en information.
Le ministre désigné pour assurer la conduite opérationnelle de la crise et la présidence de la CIC est garant du respect des règles d'organisation et de fonctionnement fixées par la présente circulaire.
3.2.1 La direction de crise
La direction de crise, dans sa dimension politique et stratégique, est assurée par le Premier ministre qui s'appuie sur le ministère menant désigné en raison de la nature de la crise, sur le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale, sur le service d'information du gouvernement, sur le secrétariat général des affaires européennes et sur le secrétariat général de la mer.
Le Premier ministre détermine les grandes lignes d'action du travail de la CIC pour la préparation des choix politiques et stratégiques de direction de crise et de communication de l'État. Il est en contact avec les structures homologues des États étrangers concernés pour préparer les décisions de nature stratégique ou politique. Il définit la stratégie de sortie de crise.
La cellule interministérielle de crise est gérée fonctionnellement et administrativement par la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) qui assure son maintien en condition opérationnelle.
Dès la mise en œuvre de la CIC, le SGDSN met en place une fonction de retour d'expérience, permettant d'améliorer la qualité de la réponse gouvernementale.
3.2.2 · Les fonctions de la CIC
La CIC est présidée par le ministre désigné par le Premier ministre pour assurer la conduite opérationnelle de la crise.
Le président de la CIC désigne un directeur délégué de crise (DDC) pour l'assister dans ses fonctions.
Ce dernier, relevant du cabinet du ministre, est secondé par un directeur délégué de crise adjoint assurant la fonction de chef d'état-major de la CIC et relevant de la DGSCGC.
Le principe de fonctionnement de la CIC repose sur la collégialité interministérielle, fondée sur la participation active de tous les ministères concernés par la crise et, en tant que de besoin, de certains experts ou opérateurs, ainsi que de cellules thématiques d'appui (6)
Compte tenu des risques d'attaque numérique accrue lors des situations de crise majeure, l'agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI), ainsi que le service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères (VIGINUM), peuvent être sollicités par le président de la CIC dès la mise en place de celle-ci ou à l'issue des premières réunions en format décision.
Quatre fonctions structurent la CIC :
- la fonction situation ;
- la fonction communication ;
- la fonction anticipation ;
- la fonction décision.
> La fonction situation assure la mise en commun de l'ensemble des informations nécessaires à l'appréciation de la situation et de son évolution.
La fonction situation est armée par les représentants des différents ministères dont la compétence pour la gestion de crise permet d'assurer la contribution active de leur ministère. Le ministère chargé du secteur principalement affecté par la crise doit nécessairement y être fortement représenté.
Elle est chargée de :
- établir la synthèse au profit de l'autorité politique, via la fonction décision, de l'information sur la situation et des renseignements émanant des centres opérationnels nationaux et d'autres correspondants français ou étrangers concernés par la crise ;
- transmettre les décisions, déclinées en termes d'effets à obtenir pour la conduite opérationnelle, à destination des centres opérationnels nationaux, zonaux voire départementaux ;
- établir le suivi des événements et des décisions prises (main courante).
En ce qui concerne les crises sur le territoire national, les centres opérationnels de zone (COZ) et si nécessaire les centres opérationnels départementaux (COD) transmettent leurs synthèses à chacun des centres opérationnels ministériels et interministériels concernés.
Les différents ministères apportent à la fonction situation de la CIC un premier niveau d'analyse, dans leur champ de compétence ministériel, sur les informations transmises par leurs centres opérationnels ministériels. La fonction situation de la CIC réalise le « point de situation national interministériel» (PSNI}. Pour limiter le risque de redondance d'informations, les centres opérationnels ministériels veillent à préciser l'origine des informations qu'ils transmettent à la CIC.
La mise en commun des informations, leur partage en interministériel et leur transmission à la fonction décision ont lieu au sein de la fonction situation. La synthèse de la situation relative à l'ordre public est réalisée directement en CIC . Les demandes de précisions et de compléments d'information aux COZ sont effectuées par la seule CIC via le COGIC, afin d'éviter des sollicitations multiples des différents centres opérationnels ministériels.
Lorsqu'il s'agit de crises maritimes, les préfectures maritimes et, outre-mer, les services des délégués du gouvernement (DDG) pour l'action de l'État en mer, transmettent leurs informations aux centres opérationnels ministériels concernés et au centre opérationnel de la fonction garde côtes (qui réalisent les synthèses pour le compte de la CIC. Comme pour le COGIC, les demandes de précisions et de compléments d'information aux préfectures maritimes sont effectuées par la seule CIC via le COFGC.
Lorsqu'il s'agit de crises extérieures, les ambassades et les consulats transmettent leurs informations à la CIC et aux centres opérationnels ministériels concernés via le centre de crise et de soutien (CDCS) du ministère de l'Europe et des affaires étrangères.
> La fonction communication éclaire et accompagne la mise en œuvre des décisions, en proposant les axes de communication déclinés dans un cadre gouvernemental. La fonction communication permet :
- d'analyser la perception de la crise par l'opinion publique et de mesurer les attentes des citoyens, de la société civile et des leaders d'opinions vis-à-vis des pouvoirs publics ;
- d'informer la population sur les événements en cours et les mesures prises par les autorités ;
- de diffuser les recommandations nécessaires via les canaux de communication adaptés - réseaux sociaux, presse, plateforme téléphonique - pour informer et protéger l'ensemble des publics concernés et favoriser un retour à une situation normale le plus rapidement possible.
C'est le directeur de la communication (7) du ministre en charge de la conduite de la crise qui assure la direction ainsi que le pilotage de la CIC communication et en déterminé la composition. Il agit en étroite relation avec :
- le cabinet du ministre chargé de la conduite de la crise, avec qui il échange tout au long de la cdse sur la stratégie à adopter ;
- le porte-parole (8) du ministre chargé de la conduite de la crise qui informe le public de l'évolution de la situation et des opérations en cours et coordonne les prises de parole ;
- le service d'information du Gouvernement (SIG).
Le chef de la fonction communication de la CIC s'appuie sur son adjoint et les équipes de son propre ministère, notamment les services de communication des directions métiers qui sont placées sous son autorité fonctionnelle le temps de la crise.
Au besoin, la CIC communication est renforcée par les responsables de la communication des ministères concernés par la crise. Le périmètre de la participation des ministères est défini en fonction de la nature de la crise. Il revient au chef de la CIC communication, en concertation avec le SIG, de les convoquer selon le périmètre et la nature de la crise. Ensemble, ils élaborent les axes de communication gouvernementale et interministérielle.
La fonction communication travaille en lien avec la fonction situation dont elle exploite les points de situation et enrichit le travail d'analyse et de veille des médias et des réseaux sociaux. Elle travaille également avec la fonction anticipation sur les axes de communication à prévoir dans la durée et cherche à devancer les événements prévisibles auxquels ils donneront lieu et leurs conséquences médiatiques potentielles.
Le chef de fonction est présent en CIC décision et rend compte des attentes de l'opinion en matière d'actions à conduire.
Le SIG conseille le chef de la CIC communication en matière de stratégie de communication et assure la coordination interministérielle de la communication de crise. Il est présent au sein des fonctions communication, décision et, si nécessaire, anticipation. Il diffuse régulièrement des notes d'opinion et de veille des médias et réseaux sociaux. Il peut également activer le centre de contacts interministériel de crise en accord avec le chef de la fonction communication. Les modalités d'activation de ce dispositif de réponse téléphonique sont arrêtées en CIC décision.
La cellule lnfopublic peut être activée, assurant ainsi la tutelle des cellules d'information du public de chaque préfecture concernée et chargées d'informer le public et d'accompagner les victimes et leurs proches.
> La fonction anticipation réalise, dès l'activation de la CIC, selon la méthodologie décrite dans le Référentiel interministériel relatif à l'anticipation opérationnelle (RIRA0) (9), les travaux d'anticipation nécessaires, d'initiative ou sur demande de la fonction décision.
Au fur et à mesure de l'évolution de la situation, l'attention est portée sur des horizons temporels de plus en plus éloignés, de quelques heures initialement pour aboutir, in fine, à une vision prospective à plusieurs jours, voire à plusieurs semaines. Les effets en cascade de la crise sur d'autres secteurs que ceux touchés à l'origine y sont analysés. Cette fonction a pour mission de :
- identifier et étudier les situations envisageables sur la base de l'analyse du contexte, des plans existants et des demandes de la fonction décision, s'il y a lieu ;
- apporter des éléments de discrimination au décideur: hiérarchiser les situations envisageables en fonction de leur pertinence (probabilité, gravité, sensibilité politique, etc.) ;
- traiter - à la demande de la fonction décision - les demandes ponctuelles destinées à approfondir un sujet en particulier ;
- proposer un plan d'actions à mettre en œuvre pour chaque situation envisageable retenue ;
- réfléchir à la sortie de crise (évolution du dispositif mis en place, mise en veille de la CIC).
Les travaux réalisés par la fonction anticipation sont présentés à la demande du président de la CIC par le chef de fonction anticipation lors des réunions de la CIC décision.
> La fonction décision prend connaissance des analyses produites par les fonctions situation, anticipation et communication, tant sur la situation du moment que sur son évolution, en débat et examine les perspectives d'évolution.
Elle prend des décisions pour la conduite de crise, pour ce qui relève de son niveau d'appréciation, et soumet au Premier ministre les propositions d'actions qui relèvent de choix de conduite de niveau stratégique, ainsi que les éventuels arbitrages.
La fonction décision donne les directives nécessaires à la mise en œuvre des décisions prises en CIC ou validées par le Premier ministre et s'assure de leur exécution.
La fonction décision établit systématiquement le relevé des décisions prises et les transmet pour mise en œuvre :
- via la fonction situation aux différents ministères et aux préfets de zone de défense et de sécurité et aux préfets de département ;
- via le COGIC aux états-majors interministériels des zones de défense et de sécurité ; via le CDCS aux missions diplomatiques concernées ;
- via le COFGC le cas échéant aux préfets maritimes et aux délégués du Gouvernement pour l'action de l'État en mer.
Elle regroupe les représentants des ministères et des administrations directement concernés par la gestion de la crise à des niveaux décisionnels et bénéficie en tant que de besoin de l'expertise des opérateurs concernés. Elle peut bénéficier de l'appui méthodologique d'un représentant du SGDSN.
IV) Prise en compte des enjeux extérieurs des crises majeures
Du fait de l'interdépendante croissante des économies, des territoires et des organisations mais également de l'apparition de nouveaux risques, une crise majeure concernant le territoire national peut avoir des origines extérieures et/ou nécessiter pour sa résolution sur le territoire national une action coordonnée des États ou des organisations internationales compétentes.
Les obligations figurant par ailleurs dans les traités auxquels la France est partie, notamment le traité de Lisbonne entré en vigueur le 1er décembre 2009 et le traité de l'Atlantique Nord, impliquent que la dimension internationale soit pleinement prise en compte dans les modes d'action gouvernementaux pour la conduite des crises majeures.
S'appuyant principalement s~r le ministère de l'Europe et des affaires étrangères, l'organisation gouvernementale de crise doit prévoir des canaux d'échanges entre la CIC et les centres de crises des gouvernements étrangers et des organisations internationales, afin de :
- recueillir l'appréciation des partenaires étrangers sur les situations de crise ;
- quand cela est nécessaire, faire émerger des positions communes ;
- élaborer les décisions nationales en matière de conduite des crises, en ayant connaissance des dispositions prises par les autres États.
Sans préjudice des conventions ou accords internationaux particuliers, la CIC, pour élaborer les décisions nationales et coordonner la conduite de crise avec nos partenaires étrangers, s'appuie sur les mécanismes de coordination et de coopération opérationnelle déjà existants au niveau ministériel, comprenant entre autres :
- le CDCS du ministère de l'Europe et des affaires étrangères, pour assurer une coordination avec les autres États et les institutions multilatérales (ONU, UE, OTAN) ;
- le COGIC au ministère de l'intérieur, en matière de protection civile ;
- le centre opérationnel de réception et de réponse des urgences sanitaires et sociales (CORRUSS) au ministère des solidarités et de la santé, point focal français de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et correspondant national du système européen de surveillance et d'alerte (Early Warning and Response System) ;
- l'ANSSI pour les aspects relatifs à la sécurité du numérique, via les procédures opérationnelles et réseaux de coopération prévus dans le cadre européen de réaction coordonnée aux incidents et crises de cybersécurité majeurs.
NOTES :
1) « Ministre de la défense» au sens du code de la défense, dont les attributions sont désormais celles du ministre des armées.
2) Ordonnance 59-147 du 7 janvier 1959 et décret 75-930 du 10 octobre 1975.
3) Haut fonctionnaire correspondant de défense et de sécurité pour les ministres des armées et de l'Europe et des affaires étrangères et haut fonctionnaire de défense pour le ministre de l'intérieur.
4) Procédure et schéma d'organisation détaillés en appendices 1 et 3
5) Cf. protocole entre l'État et Paris 2024 relatif à la sûreté des Jeux Olympiques et Paralympiques 2024 (version du 12 janvier 2021)
6) Le rôle des cellules thématiques d'appui à la CIC sont décrites en appendice 4
7) Ou le délégué à la communication, selon les ministères.
8) Lorsqu'il en existe un
9) Note n°55/SGDSN/PSE/PSN du 7 février 2023